*Directeur Technique National de la Fédération Française de Rugby
Est-ce que vous pouvez m'expliquer le principe de ces sélections ?
On appelle ça les Élites Jeunes, c'est la quatrième édition. Cela fait partie du parcours de performance fédérale, marqué dans notre projet bleu, où nous faisons le point avec les 304 meilleurs joueurs et joueuses de la filière.
Pour les garçons de moins de 16, 17 et 18 ans, ainsi que les filles de moins de 18 ans, nous réunissons les meilleurs joueurs et joueuses de chaque génération et constituons des staffs pour les accompagner pendant ces dix jours d'élites jeunes.
C'est un moment important pour la détection, l'évaluation des joueurs et joueuses, et pour continuer de les accompagner dans ce parcours de performance fédérale. Nous ne les évaluons pas uniquement, nous poursuivons aussi cet accompagnement avec des staffs couvrant tous les aspects du projet de performance de la fédération : préparation
physique, mentale, analyses de performance, data scientists, médecins, kinés, coachs, managers, et autres personnes impliquées dans la performance.
Il y a aussi l'objectif de partager le projet bleu avec l'ensemble des acteurs présents, y compris les arbitres qui bénéficient également d'un accompagnement et d'une formation.
Vous me parlez de sélection. Sur quels critères va-t-elle être fondée par rapport à ce top français ?
En effet, il y a plusieurs étapes. Comme je le disais, c'est un parcours, donc avant cela, les joueurs et les joueuses sont passés par les mercredis bleus, les stages projet bleu, etc.
Cela marque un moment, ce n'est pas la fin, c'est la continuité du parcours. Ce qui va déterminer la suite ne sera pas seulement le cut qui va se passer aux élites jeunes. Nous prendrons également en compte tout ce qui s'est passé auparavant pour prendre des décisions sur les compositions des équipes.
Il y a le festival moins de 18 ans qui arrive à la sortie des Élites Jeunes, pour les garçons et pour les filles, le festival à 15. Ensuite, il y aura les élites jeunes à 7 et les sélections à 7. Nous formerons les équipes de France moins de 18 à 15 filles et garçons.
Concernant les critères de sélection, il y a tout ce qui est lié à la performance sur le terrain : la capacité à défendre, à porter le ballon, à gagner des duels, à être dominant, ainsi que les compétences techniques liées au poste. Tous ces éléments sont répertoriés dans notre projet bleu.
Nous avons développé l'application Génération Bleue, qui utilise un référentiel de couleur pour évaluer la qualité dans chaque critère et établir un bilan global de l'évaluation de tous les joueurs et joueuses.
Nous évaluons aussi les performances physiques grâce aux tests réalisés pendant l'année. De plus, nous évaluons la capacité à progresser, à s'entraîner, à gérer le double projet scolaire et sportif, ainsi que l'environnement. Tous ces aspects psychosociaux et l'accompagnement mental sont pris en compte lors des entretiens avec les joueurs et
joueuses, pour voir si le joueur, en plus des critères rugby et physique, se sent bien tout simplement dans son moment de vie, car dans une carrière il y a des hauts et des bas. Nous savons très bien que l'impact de l'environnement personnel, familial, scolaire et de club a une influence sur la performance.
Nous tenons compte de tout cela pour composer nos équipes, mais nous savons qu'un joueur ou une joueuse qui n'est pas retenu maintenant peut l'être plus tard. Nous continuons d'accompagner notre filière de manière globale.
Vous avez cité à plusieurs reprises « le projet bleu, » mais qu'est-ce que c'est exactement ?
Le Projet bleu est le projet de performance sur lequel nous construisons nos projets pour les équipes de France et nos programmes d'accompagnement. Il définit un état d'esprit que nous appelons « l'Esprit bleu », qui se concentre sur la confiance mutuelle. Pour nous, un haut niveau de confiance mutuelle conduit à un haut niveau de performance.
Notre Projet bleu agit sur divers facteurs qui participent à cette confiance mutuelle, comme la compétence du staff, les ressources des joueurs, et les relations staff-staff et staff-joueur. Il repose également sur un concept de management basé sur la responsabilisation des staffs et des joueurs. Ceux-ci doivent devenir acteurs du projet, c'est-à-dire
qu'ils doivent s'approprier le projet bleu.
Pour ce faire, nous utilisons des méthodes d'accompagnement et de gestion de projet permettant aux joueurs de prendre des initiatives. Ils participent activement aux réunions de briefing et de debriefing et présentent eux-mêmes le plan de jeu pour le prochain match, par exemple. Rendre les joueurs acteurs du projet fait partie intégrante de
notre Projet bleu.
Le Projet bleu inclut également nos indicateurs clés de performance, définis grâce à l'observatoire du jeu. Cela nous permet d'accompagner les staffs ainsi que les joueurs dans les projets d'équipe, en tenant compte des particularités de chaque équipe, de l'effectif et de l'âge des joueurs. En résumé, le Projet bleu regroupe tous les principes
communs à toutes les équipes de France.
Votre regard par rapport à ces nouvelles générations ?
Je les ai vus un peu sur le terrain donc je vais parler vraiment de ce que j'ai vu. Globalement, ce que j'observe, c'est que nous avons des joueurs matures, ayant beaucoup baigné dans le projet bleu. Ce projet s'est diffusé à l'intérieur des clubs, car notre objectif est que le projet bleu soit partagé, challengé et qu'il y ait des principes de travail
communs au sein des clubs. De cette manière, les joueurs gagnent du temps. On voit très bien que dans les générations à venir, ce sont des joueurs déjà initiés et ayant déjà passé par des moments de travail.
Il y a eu un match le deuxième jour après l'arrivée, et on a l'impression que les joueurs s'étaient déjà appropriés le projet. En fait, il avait déjà été vu lors des différents rassemblements et travaillé à l'intérieur des clubs, ce qui rend notre système de plus en plus fort.
Nous pouvons aller plus loin dans la relation entre les clubs et la fédération pour partager entièrement le projet et les contenus d'entraînement. Cependant, on observe déjà que les joueurs se sont appropriés beaucoup de principes.
La première chose qui m'a marqué, c'est que nous avons des joueurs et des joueuses qui ont progressé sur tous les outils techniques du rugby. J'ai trouvé qu'il y avait une justesse technique assez marquée par rapport aux années précédentes.
On voit vraiment une évolution entre il y a cinq, six ans, voire plus, et aujourd'hui avec des joueurs possédant un bagage technique complet pour devenir de très bons joueurs de rugby.
En résumé, la formation française est en bonne santé. Même s'il faut continuer de travailler car les autres nations ne nous attendent pas, force est de constater que nous avons des joueurs qui atteignent les standards de haut niveau international.
Dernière question, pourquoi avoir choisi les Iscles aujourd'hui ? Pourquoi êtes-vous venus à Saint-Laurent ?
Tout simplement parce que c'était une infrastructure proche des lieux où nous réalisons les élites jeunes. C'était un terrain disponible.
De plus, les installations ont été réaménagées pendant la Coupe du Monde car c'était un site de base d'accueil, il me semble.
Nous savons donc qu'il y a de la qualité et avons sollicité les instances fédérales, locales et les clubs pour organiser cela ici. Il y a aussi une tribune, ce qui est important pour observer les matchs depuis un point élevé.
C'est bien de trouver à la fois un terrain de qualité, une tribune et un club accueillant. Bien que nous parlions beaucoup de haut niveau et d'équipes de France, notre objectif est de rester les pieds bien ancrés dans le sol avec tous les clubs.